[Echtra] Quel meilleur endroit qu'un cimetière pour vaincre la mort ?

Assurément. Il ne suffit pas d'avoir de longues dents pour chasser une proie, il faut aussi de la rapidité, des membres solides, de longs doigts fait pour enserrer des cous et des griffes pour exposer les artères, voilà de quoi la mort m'a fait. Je puis vous faire la démonstration de leur dureté s'il vous sied, la plupart des vivants préfèrent éviter de poser leurs yeux sur mes phalanges.

*Il leva une main à hauteur de ton regard et écarta ses longs doigts blafards en démonstration, certains étaient ornés de chevalières serties de grosses pierres précieuses, de quoi en rendre envieux Orcus lui-même. Ses mains étaient une des rares choses que le vampire aimait encore chez lui, elles faisaient de lui un excellent chirurgien. Il se pencha sur le voyant d'essence.*

Aucune idée. Il ressemble à une poubelle munit d'un unique long bras qui se gratte le couvercle...

*Il arqua un sourcil et vint se gratouiller la tempe de réflexion dans une parfaite imitation de l'icône du tableau de bord. L'habitacle plongea alors dans le silence pour quelques instants, jusqu'à ce que le moteur se mette à toussoter, te poussant à procéder à l'arrêt complet. Au moins t'avait-il correctement indiqué le frein. Il descendit du véhicule sans se faire prier. Ils s'étaient arrêtés à une petite station-service de campagne bordée d'un bosquet d'arbres et de champs en jachères par ce temps froid. L'environnement lui était finalement familier, tant qu'il se retourna vers toi pour prodiguer son maigre savoir.*

Bien sûr, il nous faut faire le plein de combustible... je... je préfère vous laisser cette tâche.

*Le feu...*

Elle doit être pourvue d'une trouée quelque part. Il vous suffira alors d'insérer cet embout de forme phallique et de lui remplir les entrailles avec le liquide qui s'en éjecte. Le système est trivial, mais vous connaissez les hommes.

*Il écarta les bras comme de bien entendu et te tourna le dos. Il contourna le bâtiment bas abritant un minuscule magasin, s'enfonçant dans la nuit d'un noir profond en ce lieu à la rare pollution lumineuse. Un couinement se fit entendre, suivit d'un craquement. Quelques minutes plus tard, le vampire réapparaissait de l'autre côté de l'édifice. Bien que parfaitement propres, ses lèvres paraissaient moins bleutées qu'à l'accoutumé, ses pommettes avaient même momentanément retrouvé un peu de couleurs.*

Comment utiliser une pompe à essence en 10 leçons … Echtra n’en revenait pas. Ses yeux étaient effarés d’entendre de telles paroles dans la bouche du vampire. Elle le soupçonna alors de se montrer plus prude qu’il ne l’était en réalité. Un petit sourire malicieux fendit ses lèvres tandis qu’elle songeait à emmener, la prochaine fois, le vampire dans des endroits plus adaptés à ce genre de … description. Soudain, elle s’étonna de plus bel. Et si les vampires préféraient les hommes ? Le Cabaret saurait sûrement répondre à ses besoins.
Rassurée par cette idée, elle fit signe à son compagnon de crime de s’éloigner avant d’empoigner la bête. Elle la contempla dubitative, la soupesa comme pour analyser ses capacités et la tira tout en cherchant le réceptacle. Sauf qu’évidemment, elle n’était pas du bon côté et surtout, assez mal garée pour la chose. Alors elle tira … tira et maugréa ouvertement.

- Pourquoi faut-il toujours qu’il y ait un problème de longueur ?

Echtra sortit sa baguette et agrandit la chose censée déverser son flux, de ce qu’elle avait compris. Elle découvrit la dite-trouée et tapota la voiture avec beaucoup d’empathie.

- Je sais … Douloureux et très désagréable, mais ce n’est qu’un mauvais quart d’heure à passer. Souvent cela dure beaucoup moins longtemps, courage.

[…]

Le plein d’essence fait et même un peu trop, Echtra finit par poser le regard sur le vampire. De toute évidence, elle ne servirait pas de repas ce soir. Désormais, elle portait un regard autre sur lui. Monsieur n’était pas aussi chaste qu’il n’y paraissait. A bonne hauteur et tandis qu’elle montait dans l’engin, Maman Wilkes ne put s’empêcher de lancer une nouvelle pique contre la gente masculine.

- Beaucoup plus performantes que les hommes, ces machines.

Et tandis qu’elle s’apprêtait à rajouter un détail sur les capacités de son défunt époux, elle s’imagina les remontrances de son fils, ce qui suffit à lui faire perdre tout sourire. Magiquement, Echtra ralluma les compteurs et quitta en trombe la station-service. Une heure et demi plus tard, ils arrivaient à Somerset, Maman Wilkes ravalant un long bâillement. Naturellement, elle mit du temps à s’y retrouver. Cela faisait maintenant un bon moment qu’elle n’avait pas remis les pieds … ici. Enfin, elle retrouva le chemin menant vers un coin isolé du Comté. Un Manoir finit par se dresser devant eux, peu avenant, pour ne pas dire repoussant. Autour de lui, des plaines. L’endroit parfait pour leurs futures expériences. Maman Wilkes jeta un regard mauvais à la grande bâtisse qu’elle maudissait tant. Elle l’aurait bien détruite jadis… Aujourd’hui, c’était comme si le Manoir la toisait encore de toute sa hauteur pour la rabaisser et la remettre à sa place. Son elfe de maison attendait sur le pas de la porte, immobile. Epuisée, la sorcière manqua de s’écrouler au sol en sortant du tas de ferrailles. Elle était épuisée et par conséquent, de nouveau irascible.

- Bienvenue au Manoir Gordon, cher ami. Déposons nos squelettes à l’intérieur et rejoignons nos couches respectives, il se fait bien tard et le repos m’attend si vous n’y voyez pas d’inconvénients.

L’aurore ne tarderait pas à se pointer. Quant à l’elfe, il s’inclina bien bas.

- Tout est prêt, Maîtresse.
- Bien bien, conduis Monsieur Sanguini dans la chambre conjugale. Il faut une couche digne de nos deux cobayes.

Et une humiliation supplémentaire pour ses proches ancêtres.

- Enlève toutes les photos que tu trouveras sur ton passage, compris. (à Sanguini) Suivez mon elfe, mon ami, je vous rejoins dans quelques instants.

Elle-même devait affronter ses démons et cette atmosphère lugubre que l'on pouvait d'ores et déjà ressentir sur le seuil de la porte.

*Loin d'imaginer quels chemins scabreux ton esprit venait d'emprunter sur son compte, le vampire te rejoignit et reprit sa place de passager. Il darda son regard sur toi pour te répondre avec spontanéité et enthousiasme, bien entendu il n'avait pas compris que ta remarque tenait d'un sujet indécent, lui pensait que tu parlais de l'homme avec un grand "h".*

Assurément. Les Hommes se montrent souvent lents et flaccides, je croyais être le seul à m'en être aperçu. Ahhh que leur mollesse peut parfois susciter ma déconvenue, celle de votre fils tout particulièrement. Vif d'esprit, j'avais espéré qu'il en irait de même du corps mais je crains que l'abus qu'il fait de certaines potions aient altéré sa vigueur...

*Dit-il en songeant aux gestes lents de son patron et non à autre chose. Il ne voulait qu'exprimer par là que les voitures permettaient de combler la lenteur de déplacement des hommes, surtout comparé à sa propre rapidité. Il hocha la tête comme de bien entendu avant de se rendre compte qu'il avait dit du mal de ton rejeton.*

Pardon, dans l'euphorie du moment, j'ai eu le verbe un peu trop osé contre le fruit de vos entrailles.

*Il détourna le visage dans l'espoir d'éviter de percevoir sur tes traits une quelconque détresse maternelle, elle lui rappellerait trop feu sa propre maman, de quoi en éprouver assez de culpabilité pour les 6 prochains mois. Une heure après, ils arrivèrent enfin sains et saufs, en tout cas pas plus mort qu'au départ, dans la demeure de la famille d'Echtra. Sanguini sortit de la voiture et étira ses longs membres à s'en craquer la totalité des os. L'état de décrépitude de la maison ne le choquait pas et c'était même le regard pétillant qu'il se tourna vers toi.*

Splendide ! Votre maisonnette me rappelle mon château en plus petit et sans à-pic. Dans mon pays, nous bâtissions nos châteaux à fleur de falaise de sorte que, lorsque l'un de nos gens fautait, il nous suffisait de le jeter de la tour. Nous faisions ainsi de coquettes économies de mises en bière.

*Il écarta les bras dans une expression de bien-entendu, inclina la tête avec raideur et sur ton invitation, suivit l'elfe. Il tomberait bien sur une barre ou une armoire pour trouver le repos, il ne pouvait de toute évidence refuser ton invitation sans te vexer et puis il devait se racheter pour la remarque sur ton fils.*

Je vous attends dans la chambre hum... conjugale.

Elle aurait pu piler. Elle était à deux doigts de piler. Mais elle ne pila pas, sous le choc de la révélation. Si son visage demeurait impassible – merci les dures années de labeur – elle était à l’intérieur complètement ahurie. Les visions se succédèrent dans sa tête, des visions qu’une mère ne devrait jamais avoir de son fils, même si dans son cas, elle l’avait déjà surpris en pleine action. Elle n’en gardait pas les meilleurs souvenirs du monde. Pourtant, tout portait à croire que Morgane l’avait épargnée. Orcus avec un vampire… Elle aurait pensé qu’il avait davantage de goût. Non que le vampire n’avait aucun raffinement, c’était tout le contraire. Raffinement … C’était donc ça ! Elle fut tout de même soulagée de savoir que son fils était le dominant. La mollesse, quant à elle, ne l’étonnait même pas.

- Depuis le temps que je lui dis…

Elle eut un long soupir avant de lever la main pour faire taire le vampire.

- Ne vous excusez pas. Orcus tient de son père sur ce terrain-là, j’en ai bien peur. Il suffit de voir ses fréquentations. Vous seriez surpris ! Parfois je le soupçonne même de les droguer, mais fort heureusement, il est bien plus raffiné qu’il n’y paraît.

[…]

L’exaltation du vampire devant l’ancienne demeure familiale la laissa de glace, en apparence tout du moins. A l’intérieur, elle jurait à tout bout de champ. Parmi ce capharnaüm, un petit rictus jaillit. Elle aussi avait eu son lot de meurtres, et si c’était à refaire, elle le referait sans hésiter. Quels doux souvenirs … Si doux qu’elle loupa l’invitation tendancieuse. Décidément tous avaient un penchant pour le fils et la mère ! Elle opina de la tête par simple réflexe et replongea dans les souvenirs de son enfance. Elle se revoyait, marchant la tête haute, une pile de livres sur la tête. Sa mère tenait une ceinture à la main, prête à s’abattre au moindre faux pas. Sa tenue devait être parfaite, élégante et gracieuse. Tout ce qu’elle peinait à être à ses débuts. Son père veillait au grain naturellement autant que ses frères qui laissaient aller leurs jambes baladeuses pour la faire chuter. Mais Echtra n’avait pas chuté. Aujourd’hui, elle était maîtresse du domaine et aux portes de la gloire. Fièrement, elle monta les marches menant au seuil du manoir et le franchit d’un pas lourd pour s’imposer plus que de raison.
A l’intérieur, rien n’avait changé, ce qui rendait le souvenir encore plus lugubre. Le Manoir était pourtant d’une bien belle qualité. Il n’y avait rien à redire sur le mobilier. Grâce aux elfes de maison, tout était presque flambant neuf. Naturellement, elle aurait préféré que tout soit en ruines. C’était à elle, désormais, de changer les choses. D’un pas lent, elle prit l’escalier central et gagna l’étage. Sans un regard, elle passa devant son ancienne chambre. Elle redoutait d’entrer dans la chambre conjugale, une chambre où de nombreux cauchemars avaient eu lieu. Alors elle demeura en retrait. Dormir ici ? Elle ne le voulait absolument pas. Tout sauf ça…

- Avant que nous ne nous quittions, cher ami, voulez-vous que je vous transplane quelque part ? Il réside ici trop de … souvenirs pour que j’y reste cette nuit. Si vous souhaitez y installer vos outils ou tout ce que vous jugerez bon, libre à vous. Ce manoir est à votre disposition. Par le sortilège de Fidelitas, nous serons seuls à en connaître l’emplacement. Ainsi personne ne viendra nous importuner. Nos camarades quant à eux, ne risquent absolument rien. Venez-vous ?

*Le vampire suivit l'elfe, laissant la maîtresse de maison momentanément en arrière. Il essaya de lui faire la conversation en chemin, à Poudlard, les elfes étaient les êtres qui se montraient les plus amicaux avec lui, mais la minuscule créature se montrait particulièrement mutique. Soit, il n'insista pas plus que ça, monta les escaliers quatre à quatre avec son habituelle raideur et allongea le couple nouvellement formé sur le large lit de la suite parentale. Une fois les squelettes installés, il recula de quelques pas pour admirer son oeuvre, il trouvait la scène d'une touchante poésie. Morbide peut-être, mais touchante tout de même.

Ainsi en retrait, il se trouvait tout près de la porte, de sorte qu'il avait perçut le bruit de tes pas dans le couloir et savait que tu te tenais dans celui-ci, tout près de lui et néanmoins toujours à l'écart.*

Dire que se sont peut-être ces défunts qui nous donneront la clé de la vie.

*Il recula encore un peu plus jusqu'à s'adosser au mur, juste au bord de la porte toujours ouverte.*

Ça ira Mrs Wilkes, j'ai pris assez de transports donnant des hauts le cœur pour aujourd'hui, je rentrerai par mes propres moyens et reviendrai tantôt avec les ustensiles utiles à notre art. Je vous suis pour le sortilège de fidelitas, s'il peut vous permettre de dormir sur vos deux oreilles.

*Il se dégagea du mur et sortit de la chambre pour sceller officiellement notre pacte.*

Elle eut tout juste un regard pour les deux squelettes sur le lit. Jamais elle n’aurait cru que ce manoir aurait encore autant d’emprise sur elle. Sa main glissait sur la rambarde tandis que les souvenirs s’engouffraient en elle, terribles. Plusieurs fois ses frères avaient cherché à la propulser par-dessus bord. Elle se souvenait encore de cette peur poisseuse, de cette moiteur sur sa nuque. Oh oui elle les avait craints, jusqu’à obtenir le dernier mot, comme toujours. Nul n’imaginait la haine bouillonnante en elle. Son cœur battait fortement dans sa poitrine, un fait qui n’échapperait pas au vampire, assurément.
Maman Wilkes descendit les marches une à une et s’arrêta soudainement en plein milieu, prise de haut-le-cœur. Elle ravala la bile qui lui montait et reprit sa descente, sans mot. Comme on pouvait s’y attendre, elle choisit les premières marches menant au manoir pour mettre en pratique le sort de fidélitas. Il n’était pas question qu’elle pénètre dans toute autre pièce de la bâtisse, pas ce soir du moins, pas avant d’en avoir métamorphosé chaque pièce jusqu’à la racine. La sorcière sortit sa baguette et psalmodia le sort. Un sort complexe, qu’elle n’avait jamais jeté jusque-là mais qu’il lui faudrait également jeter pour protéger le Manoir Wilkes.
Lorsqu’elle jetait un sort de haute complexité, Echtra perdait tout faux semblant. Son masque tombait pour laisser entrevoir sa lassitude, les efforts qu’elle mettait dans la tâche mais aussi la droiture qu’elle s’imposait sans relâche. Bref, elle apparaissait tristement humaine. Ce qu'elle n'aurait sûrement pas apprécié si on le lui en avait fait la réflexion. Sa bouche asséchée par ses différents ressentis, elle mit un certain temps avant d’atteindre le succès. Elle chancela, presque imperceptiblement, avant de réendosser son éternel rôle de femme forte. De sa baguette, elle fit apparaître en lettres de feu l’adresse, juste sous les yeux du vampire.

- Vous voici désormais Gardien du Secret, mon ami. N’en dites rien à mon fils. Il ignore tout de cette demeure et je préfère que cela reste ainsi, si vous n’y voyez aucun inconvénient. Je ne suis pas certaine qu’il y comprendrait grand-chose, et ce … en dépit de la … (elle déglutit et fit un geste dans le vide de la main) relation que vous dites avoir. Il serait bien capable de nous faire enfermés, c’est pour dire !

Elle lui adressa un léger sourire avant de s’approcher et de poser un main amicale sur sa manche.

- Ce fut une soirée des plus amusantes, cher ami. Je n’en avais plus vécu de telles depuis bien longtemps. Nous recommençons dès que vous le souhaitez. Sur ce, permettez que je prenne congé. Agatha reste à votre disposition, si vous avez besoin de quelque chose. Bonne nuit à vous très cher.

Après s'être inclinée et sans un regard pour la sombre demeure, elle transplana directement aux Embrumes, chercher quelque compagnie et une en particulier.