[Parrain Batman] J'vais le dire à Parrain na !

Échapper à cet enfer. Trouver une excuse tangible pour ne pas accompagner Pansy chez Pieddodu. ENCORE. Certes, la dernière fois elle avait fait une rencontre des plus intéressantes. Mais ces miracles-là n'arrivaient pas trente-six mille fois et aucune chance qu'elle n'y trouve le Professeur Wilkes. Dans le cas contraire, celui-ci descendrait dans son estime indubitablement. Heureusement son Orcus Wilkes avait de bien meilleurs goûts, obligatoirement puisqu'il lui avait tapé dans l'oeil ! Il ne pouvait en être autrement, n'est-ce pas ?
Comme excuse, elle avait d'abord pensé à son bel Apollon donc. Seulement, il trouverait encore une fichue excuse pour lui échapper, à coup sûr. Si le monde pouvait arrêter de tourner autour de lui, aussi ! Il était sien point final. Peut-être allait-elle devoir demander des conseils à son parrain sur le sujet "Orcus Wilkes" car ce n'était sûrement pas cette gourde de Pansy qui allait bien pouvoir lui venir en aide. Quant à Flora ... n'y pensons même pas. Ce fut à cet instant que toute la lumière se fit : SON PARRAIN ! L'idée d'exiger une entrevue et surtout un peu de temps pour elle la fit sourire jusqu'aux oreilles. D'une part il la sauverait du calvaire Pieddodu, d'autre part il lui accorderait toute son attention. Et Millicent adorait être au centre de l'attention de son parrain. Pas par vanité, quoi qu'un peu tout de même, mais surtout parce qu'elle-même l'adorait sincèrement. Une place à en faire rougir de jalousie le professeur Wilkes assurément !  

Après s'être hâtée de rédiger une courte missive à l'adresse d'Augustus, Millicent l'envoya avec un banal hibou de l'école. La discrétion était toujours de mise, car personne, à l'exception de ses victimes, ne devait connaître la relation qui les unissait. Et pour cause, rien n'était plus jouissif que d'observer la mine déconfite des ignorants lorsque ceux-ci se retrouvaient en très mauvaise posture. On ne soupçonnait que trop peu les Bulstrode, or ces derniers avaient des relations plus que haut-placées. De surcroît, son secret lui permettait d'être les yeux et les oreilles d'Augustus à Poudlard. Elle adorait lui raconter les potins et lui broder toutes sortes d'histoires. Mais par-dessus tout, elle prenait à coeur de lui rendre de temps à autres quelques services. S'il y avait bien une chose qu'elle convoitait autant que l'amour du Pr Wilkes, c'était bien la fierté de son parrain. Aussi la Serpentard veillait toujours à apparaître un minimum distinguée dans son apparence dès lors qu'ils se voyaient. Pas question de paraître négligée alors qu'elle l'était déjà suffisamment dans son attitude.

Le repas du midi passé, les fauves furent lâchés dans Pré-Au-Lard. Sa bande se dirigeait déjà vers Honeydukes, leur petit rituel. La bâtisse lui rappelait son entrevue avec ce cher auror et son rat galeux. Son parrain allait être fier de son vilain tour. Un sourire mauvais glissa sur son visage tandis qu'elle observait ses camarades rentrer à tour de rôle. Ce fut à ce moment précis qu'elle choisit de leur fausser compagnie et prit le chemin des ruines de Zonko. Le temps était grisâtre et annonçait de la pluie, au mieux quelques flocons. Rien ne pouvait être plus parfait. Le temps jouait en sa faveur et forçait les élèves à se disperser pour se mettre à l'abri. Millicent put donc sans mal s'infiltrer dans ce qui restait de Zonko dont l'apparence était devenue miteuse et même effrayante pour les froussards. Sur ses gardes, elle sortit tout de même sa baguette, au cas où un idiot aurait eu la mauvaise idée de s'y trouver. Le faisceau de son lumos  évita à un rat de se faire écraser. Au lieu de ça, il rencontra le visage de l'adolescente qui le fit déguerpir à grands coups de "bouh".
Elle n'avait plus qu'à attendre son parrain et à se répéter tous les ragots qu'elle avait à partager avec lui. Enfin une après-midi excitante, comme elle les aimait !

A la vue de son parrain, le visage de Millicent s'éclaira de joie. Un rictus de fierté naquit sur ses lèvres et, comme toute bonne filleule, elle se précipita dans ses bras pour lui briser les os. Mademoiselle ne contrôlait pas sa force, voyez-vous ?

- Je suis si contente de vous voir ! Merci de m'éviter la vieille Pieddodu. Je ne supporte plus les odeurs de citron et de sucre qui y pèsent, minauda-t-elle contre la poitrine de son parrain. Vous allez m'emmener prendre une bièraubeurre n'est-ce pas ? J'ai beaucoup de choses à vous raconter !

Millicent n'était pas câline, encore moins tactile. Son parrain était, en l'occurrence, l'exception qui confirmait la règle. Avec un père régulièrement absent, Augustus Rockwood était devenu, depuis son entrée à Poudlard, l'unique figure masculine dans la vie de la Serpentard. Drago, Crabbe et Goyle étaient encore bien trop immatures et crétins pour être considérés comme telles. Quant au Professeur Wilkes, et bien il avait révolutionné son paysage. Pourtant, il était fort à parier qu'elle fut moins démonstrative avec lui. Peut-être parce que son admiration avait été amoindrie par l'apparition d'un certain auror dans son tableau idyllique. Et puis son parrain était le plus fort, le meilleur d'entre tous et un homme qui pouvait être très très très cruel, Millicent en était convaincue. Elle l'estimait pour sa dévotion aux ténèbres, aux valeurs du sang et pour sa position au Ministère. Rien ne semblait pouvoir faire de l'ombre à cet homme : il était intouchable. Aussi l'adolescente voulait-elle suivre son chemin. Elle aussi aurait le monde à ses pieds !

- Je vais bien, même si les aurors font tout pour me gâcher la vie. Vivement qu'ils mordent la poussière.

Desserrant son emprise pour le laisser respirer, elle se recula pour le contempler -cette moustache faisait décidément toute la différence ! - avant de se mettre à observer les débris autour d'eux.

- J'ai choisi ce lieu au cas où vous auriez besoin de discrétion, se justifia-t-elle en haussant ses larges épaules. La cabane hurlante est infestée par la vermine, on l'a pas encore dératisée avec les copains. Vous allez l'air fatigué, Parrain. Qui vous fait du tort ?

Ou plutôt "qui devait-elle boxer ? " car déjà ses poings se contractaient. Qui osait donc s'en prendre à sa famille ? Parce qu'il y avait forcément un coupable. Aux yeux de Millicent, son parrain ne pouvait pas être fatigué par l'âge ou le travail comme tout homme banal. Seuls les gens faibles ressentaient la fatigue du quotidien, or depuis son plus jeune âge, son parrain était un surhomme, point à la ligne.

-Si c'est Potter et sa bande, je vais en faire de la chair à pâté !

En prendre à emporter ? Peut-être. Enfin, façon de parler. Elle enverrait quelqu’un prendre sa commande discrètement afin de ne plus mettre les pieds dans cet endroit infesté de niaiserie et d’amour à l’eau de rose.
Elle aussi avait regretté la perte de Zonko. La boutique de Farces et attrapes s’était révélée des plus utiles pour mater la vermine. Alors qu’aujourd’hui, il n’était pas question de nourrir le commerce Weasley. Du moins pas de façon apparente encore une fois. C’est que Mademoiselle avait une réputation à tenir ! Se fournir chez des rouquins sans un sous et fans absolus de Potter ? Jamais de la vie !

Une fois dehors, la Serpentard jeta un coup d’œil autour d’eux, sur ses gardes. On n’était jamais trop sûr de rien. Quiconque lui apparaîtrait suspect finirait dans les poubelles. Elle l’avait déjà fait avec un Serdaigle qui les avait suivis un jour d’un peu trop près. Millicent releva enfin le visage vers son parrain et hocha vivement la tête.

- Ils rôdent autour de nous, prennent la défense des bouffondors et veillent à ce qu’on ne fasse pas de bêtises. Déjà qu’on est obligé de se taper Fol Œil … se lamenta-t-elle en surjouant un tout petit peu. Ils sont même à Pré-Au-Lard ! Y en a même un, il a voulu me racketter en pleine boutique d’Honeydukes ! J’ai dû lui rappeler combien il était dangereux et suicidaire de s’en prendre à une Bulstrode. En plus il se baladait avec un rat dans les bras, bonjour l’hygiène ! Vous ne trouvez pas que le métier d’aurors se dégrade, Parrain ? Ils engagent vraiment n’importe qui aujourd’hui. Entre Fenwick et ce mariole qui a voulu me voler …

Oui, elle ne démordait absolument pas de cette version, car les faits étaient là ! Cet auror à la noix avait voulu lui voler SES nougats. Elle n’avait fait que rétablir un semblant de justice ! Maintenant l’étalon allait devoir payer les pots cassés. Et toc !

- Le Ministère se fait vieux, non ? De nouvelles formes de magie, dites-vous ?

Une information qui n’était sûrement pas tombée dans l’oreille d’une sourde ! En règle générale, Millicent faisait toujours preuve de sérieux dès lors qu’elle discutait avec son parrain. Certains sujets s’y prêtaient et bien souvent, ils étaient tous dignes de son intérêt. De surcroît, la Serpentard prenait soin de décortiquer chacune des paroles de l’homme qu’elle considérait de sa famille. Car savait-on jamais si une info croustillante et inédite ne s’y trouvait pas. Millicent aimait être au fait des choses et surtout être dans les confidences – du moins celles qui en valaient la peine-.

- Vous pouvez m’en dire plus ?

Elle savait bien qu’en tant que langue-de-plomb, c’était pas gagné d’avance. Mais sa bouille d’ange valait un petit sacrifice non ?
Ils passèrent la porte des Trois-Balais et tout en se dirigeant vers une table reculée au fond du pub, elle répondit avec lassitude :

- Je dors avec des bœufs et des macaques. Soit ça ronfle, soit ça parle dans son sommeil comme si on en avait quelque chose à faire. Comment voulez-vous que j’aie le sommeil paisible ? se plaignit-elle de nouveau. Pourtant, j’essaie de faire les plus beaux rêves du monde, mais il y a toujours un cloporte pour venir le gâcher : Granger, Fenwick, Lovegood … énuméra-t-elle sur ses doigts potelés tandis qu’elle réfléchissait à tous ses rivaux.

Parler du Professeur Wilkes ? Ne pas parler du Professeur Wilkes ? Son Parrain aurait-il des conseils pour elle ? Comprendrait-il son désarroi profond ?

- Dites Parrain, vous avez des techniques de drague à me recommander ?

Son ton était nonchalant, presque désintéressé alors qu’en réalité elle mourait d’envie de savoir et de honte aussi. L’idée de confesser son amour la rendait toute chose. Ses joues prenaient petit à petit une teinte rosée, bientôt rouge. Qui pouvait croire à un tel revirement de situation ?

- Comment avez-vous séduit Tantine ?

Tantine Séphira qui aurait également droit à un même interrogatoire. Peut-être serait-elle plus encline à l’aider ou à lui donner des conseils moins vieillots que ceux auxquels elle s’attendait de la part d’Augustus. Car son parrain, séducteur ? Impossible. Comme tout enfant à sa place, Millicent voyait en Augustus un gros nounours, protecteur, bienveillant. A cela près que le sien, tout aussi unique qu’elle, tuait tous ceux qui lui faisaient obstacle ou qui touchait à sa famille. Un gros nounours badass parce que c’était le sien ! (eh ouais bande de jaloux ! )

Millicent ne pouvait qu’être d’accord ! Heureusement elle avait les professeurs Rogue et Slughorn dans la poche. Le premier parce que naturellement il ne pouvait que valoriser les serpents, le deuxième parce qu’il achetait très régulièrement de l’alcool à sa famille. Cela compensait le comportement aigri de la vieille McGonagall et les psychoses de Fol Œil ainsi que le soulignait son cher Parrain. Naturellement l’élève nota dans un recoin de sa tête les infos sur le vieux dingo. Si seulement quelqu’un avait le courage de reprendre les choses en main ! Ombrage aurait pu faire l’affaire. Elle avait d’ailleurs très apprécié de faire partie de la brigade inquisitoriale. Cela étant, ne rien faire en cours de DCFM devenait à la longue barbant. DCFM + Histoire de la magie, c’était à se demander pourquoi se lever le matin. Est-ce qu’un jour ils auraient un professeur à la hauteur ? Ce n’était pas gagné. Pour le coup, Millicent rejoignait Drago sur la déchéance progressive de l’école. Ce à quoi, elle ajoutait souvent que le monde magique, de toute façon, allait à vau-l’eau depuis la naissance de Potter.
Quant à ce cher Noctis, il avait été suffisamment malin (ou pas ?) pour ne pas donner son nom. Malheureusement, une fois dans le collimateur de la Serpentard, il était difficile de quitter son esprit.

- Ce lâche ne s’est pas donné cette peine, non. Mais je peux vous le décrire Parrain. Armoire à glace aussi débile qu’un manche à balai (pardon !), brun, le regard inexpressif et drogué aux nougats de Madame Flumes.

Et là un détail lui vint (prépare ton arrêt de mort Darling !). Un détail qu’elle ne pouvait laisser passer et qui bizarrement lui apparaissait aussi clair que de l’eau de roche !

- Et son rat m’a traitée de suceuse ! s’offusqua-t-elle en prenant un air outré et terriblement scandalisé. Vous vous rendez compte Parrain, suceuse ?! C’est un motif suffisant de renvoi vous ne croyez pas ? Ou un blâme suffisamment conséquent pour faire … *elle mima sa gorge tranchée* couic à son rat. Vous pourriez faire ça, Parrain, hein hein?

Elle eut un bref sourire diabolique tandis qu’elle imaginait la déconvenue de l’auror. Etrangement, elle était certaine qu’ils se recroiseraient très prochainement. Et là alors, il se rappellerait le nom de « Bulstrode », elle deviendrait son pire cauchemar. (insérez ici un rire démoniaque).

- Je comprends, Parrain. Mais comme vous savez, qui ne tente rien n’a rien. Je vais me contenter de ma commande !

Ainsi commanda-t-elle une tarte aux noix de pécan avec non pas une mais deux bièraubeurres. Une avant, et une après la tarte voyons ! Le regard échangé avec Rosmerta ne fut pas très chaleureux, mais qui cela étonnerait ? Millicent avait sa réputation aux Trois Balais, son manque de discrétion entourée de sa bande était légendaire.
La commande arrivée, l’élève se désaltéra également. Une fois son appétit ouvert, elle put entamer sa tarte. La cuillère en pleine bouche, elle resta interloquée à la réponse d’Augustus. Elle-même ? Rester elle-même ? C’était ça le secret ?

- Vous êtes sérieux ? Moi-même ?

A coup sûr Tantine saurait mieux y faire. Peut-être son Parrain n’était-il finalement pas le mieux placé.

- Un jeune garçon ? répéta-t-elle la bouche pleine cette fois.

Beurk ! Parfois son Parrain n’était pas tout à fait net, la naïveté parentale probablement. Elle ne lui en voulait cependant pas, il pouvait être gâteux. Qu’allait-elle pouvoir lui dire cependant. C’était soudainement risqué, presque gênant. Et pourtant … c’était son Parrain.

- Je préfère les hommes mûrs. C’est un sang-pur, ancien serpentard, finit-elle par dire en remplissant autant sa bouche que possible pour ne plus avoir à répondre.

La prochaine fois, elle l’annoncerait d’abord à Tantine pour qu’elle tâte le terrain. Allait-il faire une crise cardiaque ? Lui en vouloir ? Allait-elle le décevoir ? Impossible ! Pourtant Millicent était bel et bien inquiète. Ses copines n’étaient pas d’un grand soutien en la matière. Comme si elle ignorait qu’elles se moquaient derrière son dos ! Sauf que pour le coup, la Serpentard s’en fichait. Le professeur Wilkes serait à elle, que le monde le veuille ou non. A la fin de sa tarte, elle entama sa seconde bièraubeurre et finit par ajouter d’une petite voix :

- Les garçons sont trop niais, débiles et pleurnichards, se justifia-t-elle avec un petit sourire qui se voulait rassurant. Ils ne font pas le poids face à moi, ils décampent la queue entre les jambes dès que je lève ma main. Lui n’a pas peur.

Millicent observait la réaction de son parrain non sans prendre un malin plaisir. L’auror n’aurait qu’à bien se tenir s’il ne voulait pas recevoir les foudres de tonton Augustus ! Non contente de son petit effet, la Serpentard montra la chope à moitié vidée de son doigt un peu potelé.

- Vous ne finirez pas, Parrain ? Il ne faut pas gâcher.

Sans demander son reste, la Serpentard prit la chope et en but une longue gorgée comme si elle n’avait pas bu depuis des semaines. Parler donnait soif, non ? C'était qu'elle n'en avait pas franchement l'habitude. Usuellement ses poings était son langage principal.

- S’excuser ? On parle d’un auror, Parrain, pas d’un Poufsouffle. Ils ne connaissent ni la politesse ni le respect. Il a même dit que sa bestiole lui avait crevé la langue. Non ! Attendez ! C'était la bouche ! Ou des maux dans la bouche … Raaaah j’ai le mot sur le bout de la langue.

Langue qu’elle tira d’ailleurs comme pour illustrer ses propos.

- Ah oui ! Qu’il lui avait enlevé les mots de la bouche ! cria-t-elle sous le coup de la victoire avant de lâcher un soupir. Oui, Parrain, je ne suis pas Potter, j’ai encore toute ma tête moi ! répliqua Millicent en se renfrognant très légèrement comme à chaque fois qu’il était question du binoclard. Quoi la signification ? Personne ne peut m’interdire de sucer des plumes en sucre.

L’adolescente feinta l’incrédulité juste pour faire marcher son parrain. C’était certes cruel, mais les désillusions d’Augustus l’amusaient profondément, tant que cela ne lui portait pas préjudices évidemment. Ne jamais décevoir son parrain. Jamais. Elle prit une nouvelle gorgée de bièraubeurre, lécha la mousse sur ses lèvres et ricana enfin.

- Bien sûr que je sais ce que ça veut dire. C’est comme ça que Pansy parle de cette Sang-de-bourbe de Granger. Même si je suis certaine que l’idée hérisserait les poils de cette Miss-Je-Sais-Tout alors qu’elle semble plaire à Drago si vous voulez mon avis. Il a toujours une tête bizarre face à Granger, comme s’il voyait un revenant. Faut dire que le petit Prince des Serpentards a une attitude bizarre depuis la rentrée. On dirait qu’il est perpétuellement absent, sur orbite.

Cette fois, Millicent s’adossa à sa chaise et croisa ses bras, ce qui lui donnait singulièrement l’air d’un gorille renfrogné. Seul son rictus amusé éclairait son visage. Son Parrain pouvait être si drôle ! Ses yeux porcins ne le quittaient pas un seul instant du regard tandis que son visage passait par toutes les expressions. Quelle bombe n’avait-elle pas lancée !

- Croyez-moi, Parrain, ils sont rares ceux qui aiment que je les frappe. J’en connais qu’un seul et c’est un bouffondor ! Il vient d’ailleurs d’apprendre qu’il avait un jumeau ici même à Poudlard ! Vous auriez dû voir sa tête quand je le lui ai appris ! Ahahah ! En même temps avoir ce Kevin pour jumeau, ça craint, même pour lui ! Mais ça fait mes affaires, si je peux avoir un bouffondor dans la poche, c’est plutôt bon pour nous, n’est-ce pas Parrain ? Il pourrait se révéler utile.

Enfin fallait pas trop abîmer sa gueule d’ange non plus. Qui lui servirait de punching-ball sinon ? A l'heure qu'il était, il devait d'ailleurs se trouver avec sa bande de losers. Tant pis, elle s'en occuperait plus tard.

- Quant à Maman, le ministère l’occupe assez, dit-elle avec une certaine désinvolture. Voyons, il est né le 9 septembre 1969. Alors ça fait …

Elle calcula sur ses doigts alors même que la date d’anniversaire de son professeur lui était venue spontanément.

- Hum, je crois que ça lui fait vingt-si … Quoi ? Me protéger ?

Cette fois, Millicent éclata de rire, non sans quelques rougeurs aux joues. Oulala si seulement ! Rien que l’idée … [image censurée] Elle se trémoussa quelques instants sur sa chaise avant de venir tapoter la main de son parrain.

- Respirez. C’est mon professeur, révéla-t-elle non sans une certaine vantardise, alors niveau études, je crois qu’il n’y a pas à s’en faire. Je n’ai pas eu en dessous de A depuis des semaines. Sauf en histoire de la magie. Mais quand on voit Binns en même temps. Cette vieille McGonagall essaie bien de me saquer aussi, je l’ai vu, mais je suis plus rusée ! Et puis, vous allez être doublement ravi, c’est un sang-pur ! J’ai le flair pour les dénicher.

Maintenant, il ne restait plus qu'à éliminer toutes ses rivales et même ... tous ses rivaux. Force était de constater qu'ils étaient d'ailleurs de plus en plus nombreux. Cela ferait beaucoup de sang sur ses mains. Dommages collatéraux.
Millicent haussa les épaules à la suite des paroles de son parrain. Il n’était pas né l’homme qui la tiendrait enfermée comme une bonne femme au foyer. Plutôt vivre avec un strangulot ou ce nigaud d’auror ! Quoi que … Non, en fait non, pas lui non plus !

- Je lui ferai manger ses pantoufles, ne vous en faites pas. […] Spirituquoi ? Attendez, c’est pas un des mots préférés de Tantine ?

Preuve qu’elle écoutait beaucoup ses cours … (mais si !)

- Mais pour vous répondre Parrain, je ne crois qu’en la pureté et la force du sang. Est-ce que la spiritualité va me permettre d’obtenir l’attention de mon Professeur ?

"Sinon quel intérêt ?" pensa-t-elle en silence, pas certaine d'être captivée par la chose.

Elle ne pouvait avoir de la pitié pour Drago. De durs événements ? Peut-être et alors ? Ce n’était pas son père qu’on trouverait en prison ! De plus, en tant que Serpentard, Millicent estimait qu’ils ne devaient jamais se montrer faibles, peu en importait la raison. La maison des Serpentards devait démontrer sa force, garder la tête haute en toute circonstance. Or Drago avait perdu de sa splendeur au profit d’une certaine mollesse qui exaspérait l’adolescente. Son verbe-même en avait pris un coup. Aussi, l’idée que le Seigneur des Ténèbres avait pu lui confier une mission ne lui traversa aucunement l’esprit. Le grand manitou dont on vantait la cruauté ne pouvait vouloir d’un tel Serpentard à son service. Malefoy était dépassé.

- C’est bien pour cette raison que je ne suis jamais préoccupée ! railla-t-elle avec nonchalance. Juste occupée à jouer avec les premières années, histoire de leur apprendre la vie, vous voyez ! Pansy ne cesse de me flatter sur mon bon coeur.[…] Ah oui 28, oui c’est ça.

Là encore il lui faudrait penser à un nouveau cadeau. Les premiers n’avaient pas franchement eu l’effet escompté. Mais peut-être que Tantine aurait un plan ! Elle l’espérait car son professeur de botanique était bien difficile à conquérir.

- La botanique. Je crois d’ailleurs que sa plante préférée est la mandragore. Je le surprends parfois à les contempler avec un regard attendri.

Un regard qu’elle avait souvent jalousé avant de se dire qu’elle valait mieux qu’une plante ressemblant à un bébé chouineur. Elle pouvait se montrer si conciliante envers l’homme de tous ses fantasmes si celui-ci lui en donnait l’occasion.
Millicent écouta ensuite les propos de son Parrain sur la spiritualité et l’amoûûûr. Si elle se souvenait de leur mariage ? Assurément ! Rose bonbon, elle ne pouvait guère oublier ! Sa chère et tendre mère l’avait forcée à s’afficher dans cette horrible couleur, à son grand damne. L’une des rares fois où elle avait réussi à obtenir quelque chose de sa fille.

- Oui, bien sûr, que je m’en souviens !

« Faits l’un pour l’autre ». Bon, Dieu n’était peut-être pas très d’accord avec ses pratiques et sa manière de séduire son professeur, mais il avait mis le Professeur Wilkes sur sa route ! Ils ne pouvaient donc que finir ensemble ! C’était la volonté de Dieu ! Tout était écrit ! Par conséquent, les paroles de son parrain ne faisaient que renforcer ses convictions bel et bien ancrées dans son esprit. En revanche, elle mit de côté tout le blabla sur l’amour transcendantal, la force mystique, qui étaient bien trop abstraits pour elle. Elle voulait son professeur et cela lui suffisait amplement. Pour le reste religion et fumisterie attendraient.

- Donc vous n’avez eu que Tantine ? Du début jusqu’à la fin ? Tantine et seulement Tantine ?

Une question mi-curieuse, mi-innocente. Si Millicent n’était pas portée sur le sexe à proprement parlé, elle s’interrogeait sur les pratiques de son oncle. Un religieux certes, un époux fidèle certes, mais un saint ? Elle ne l’imaginait pas ainsi. Ce qui ne l’empêcha pas de plisser très légèrement les yeux, méfiante. En effet, l’adolescente soupçonnait Augustus de vouloir l’embrigader dans le carcan « un seul homme pour toute une vie », pas de « tagada tsoin tsoin » avant le mariage.
Elle s’essuya la bouche sans le quitter du regard avant de pencher légèrement la tête devant le comportement étrange de son Parrain.

- Ne vous en faites pas, Parrain, Tantine est une excellente professeure, le taquina-t-elle avec le visage le plus compatissant du monde.

Puis elle s’empara du sujet Kevin, comme elle s’emparait des potins qui l’intéressaient. Savait-elle qu’il s’était fait enlever ? Très brièvement. Une information passée comme ça. Elle n’avait pas encore pu lire la Gazette encore, et ignorait donc la double affaire concernant les Wilkes. Son pauvre Orcus …

- Hum il semblerait, répondit-elle évasivement en faisant étirant ses doigts. Je n’en comprends toujours pas l’intérêt d’ailleurs. En quoi un Serdaigle tout juste arrivé d'on ne sait où pourrait être utile à Vous-savez-qui ? Mais apparemment il traînait avec Weasley, qui s’est fait choper aussi. Dommage qu’il soit toujours apte à jouer le match de ce weekend. Serpentard n'est pas près de gagner la coupe encore une fois... Ils auraient pu un peu mieux le cabosser non ? J’en saurai peut-être plus auprès de Pickering, si j’en éprouve de l’intérêt. J’ai juste appris par une gamine de troisième année que Potter avait été interdit de sortie ce soir-là, ils avaient peur qu’il vole au secours de son rouquin d’amour, raconta Millicent sans se douter un seul instant que son parrain était dans le coup. D’ailleurs, comment êtes-vous au courant ?

Le « bien sûr » la laissa songeuse. Y croyait-elle ? Non. La question avait été éludée trop vite, même pour elle qui n’était pas fan des blabla incessants. Elle n’insista cependant pas, préférant ne pas s’aventurer sur cette partie un peu trop intime pour ses chastes oreilles. Rien que l’assurance de son parrain quant aux talents de sa tantine préférée était de trop à son goût. Déjà des images arrivaient dans sa tête. Millicent s’empressa de les oublier en fermant les yeux avec violence. Non non non … Heureusement, revenir à son grand amour la sauva. Une fois de plus, le Professeur Wilkes apparaissait comme son héros ! Elle s’apprêtait même à en dire davantage sur son professeur aussi ténébreux que mystérieux jusqu’à ce que la Gazette apparaisse sous son nez. Le temps d’une très brève seconde, elle crut que son Parrain la congédiait ou du moins se désintéressait de tout ce qu’elle avait à lui dire. Ce qui la surprit. Mais pas autant que les gros titres.

- NON ! rugit-elle en cognant du poing sur la table, oubliant de fait toute discrétion.

Aussitôt la colère monta en elle tandis qu’elle arrachait des mains de son parrain, le journal. Ses yeux furieux le parcoururent avec rapidité. Qui avait touché à son Professeur ? Qui avait été suffisamment fou pour accomplir un tel acte ? Le visage de Jugson lui apparut et d’une voix on ne peut plus sérieuse, elle demanda les dents serrées:

- Ce Jugson, vous le connaissez ?

La voix de Millicent n’était plus qu’un souffle tandis qu’elle se plongeait dans l’article pour connaître l’état de son professeur. Ce qu’elle y découvrit, notamment son escapade chez les moldus et la compagnie à son bras, la rendit rubiconde. C’était une mauvaise blague, cela ne pouvait en être autrement ! Skeeter allait payer pour ses mensonges. Le Professeur Wilkes avait bien trop de style et de prestance pour côtoyer la vermine. L’adolescente survola le reste et redonna un peu brutalement le journal à son parrain.

- Est-ce que c’est LUI qui veut le tuer, Parrain ? interrogea-t-elle d’une voix blanche. Dites-moi ce que vous savez. Je veux savoir !

Si c’était là clairement le caprice d’une adolescente un peu trop encline aux affres amoureuses, sur le moment, Millicent ne ressemblait nullement à la jeune fille qu’elle était d’ordinaire. Rares étaient ceux qui l’avaient déjà vue aussi sérieuse. Sauf qu’elle n’admettait pas qu’on vienne s’aventurer sur son territoire sans permission. Or, aux yeux de la Serpentard, Orcus Wilkes était irrévocablement le sien. Que le monde ne soit pas encore au courant était des plus fâcheux ! Un point auquel il lui faudrait remédier. Mais pour le moment, elle avait besoin de démêler le vrai du faux. Aussi, pour mettre son parrain dans les meilleures conditions possibles, elle décida de répondre d’abord à ses propres questions.

- Il a un nom à coucher dehors, mais je crois que c’est Entwhistle. Le Professeur Rogue s’en amuse assez pour le retenir. Mais son frère a un nom différent. C’est Adam Pickering si cela vous intéresse. Quant à ses points faibles, j’en connais au moins un. C’est sa copine, la sang-de-bourbe Branstone. Une Poufsouffle ... C’est la souffre-douleur d’une des jumelles Carrow, précisa-t-elle avec un rictus mauvais pas peu fière que les Serpentards répandent la terreur dans toutes les maisons.

Millicent n’était pas la plus intelligente de toutes les filles de son âge, certains diraient même qu’elle n’atteignait que la moyenne. Cependant, elle n’était pas née de la dernière pluie. Son parrain s’intéressait de trop près au Serdaigle pour ne pas attiser l’intérêt de sa filleule.

- Et si vous me disiez Parrain, pourquoi cela vous intéresse-t-il autant ? chuchota-t-elle enfin en penchant la tête vers lui à son tour. Qu’est-ce que vous attendez de lui ? Je pourrais peut-être vous aider. Vous savez comme moi que les Serpentards sont les maîtres de Poudlard, ce que vous souhaitez, nous pouvons vous l’obtenir.

Un tantinet rabrouée, Millicent se tut, non sans une moue boudeuse et hautement contrariée. Si elle n’aimait pas être rappelée à l’ordre, elle l’aimait encore moins quand cela venait de son parrain. Pas parce qu’il n’en avait pas le droit, bien au contraire, mais parce qu’elle n’aimait pas qu’il emploie l’autorité avec elle. Cela lui donnait l’impression de fauter, de le décevoir. Ce qu’elle détestait par-dessus tout. En outre, la Serpentard ne calculait pas comme son oncle. Si lui prônait la discrétion, elle préférait de loin prévenir ses ennemis de son arrivée imminente afin de leur donner l’occasion de trembler un peu. Sinon, ce n’était pas drôle !
Néanmoins, l’adolescente finit par s’intimer au calme. Elle inspira profondément et desserra ses phalanges. Les sourcils froncés sous le poids de son sérieux, elle écouta en silence les maigres informations de son parrain. Lui donner une leçon ? Pour quel motif ? Elle fronça un peu plus les sourcils encore, comme si la réponse était là sous ses yeux. Or pour Millicent, tout ça dépassait l’entendement. Si maintenant les mangemorts et partisans se tiraient dans les pattes, ils étaient bons pour choisir le camp de Potter et être sûrs de survivre ! Pourtant, elle-même était partisante des petites leçons qui faisaient office de piqûres de rappel. A croire que tout ce qui touchait de près ou de loin au professeur Wilkes avait tendance à la faire changer d’avis comme une vraie girouette.

- Je croyais que nos (elle murmura avec exagération) ennemis étaient tous ceux liés à Potter ? Et les grands dadais d’aurors. Wilkes n’est ni l’un ni l’autre.

N’est-ce pas ? Il ne pouvait être dans le camp du binoclard. C’était impossible ! Personne ne pouvait trahir la noble lignée des Serpentards, pas même son Orcus. Même si elle devait bien l’avouer, cette excursion chez les moldus la contrariait autant qu’elle la décevait. Fenwick l’avait ramolli, c’était la seule explication tangible.

- Et j’essaie de le remettre sur le droit chemin, soupira-t-elle accompagnée d’une légère moue tendre. Mais il ne voit que par cette Sang-de-bourbe de Granger, cette Sang-de-bourbe de Branstone et cette folle de Lovegood. Sans oublier Fenwick.

Un panel qui l’horrifia en toute honnêteté. Deux sang-de-bourbes, une tarée et une fillette, c’était pousser le bouchon un peu loin ! Mais un Serpentard tel que lui devait forcément avoir de la suite dans les idées, un plan, quelque chose … De telles fréquentations ne pouvaient qu’être destinées à la manipulation !

- Il doit forcément vouloir obtenir quelque chose d’eux, le défendit-elle alors auprès d’Augustus. Un Serpentard ne peut pas trahir sa maison, c’est impossible. Nous avons le sang bien trop pur pour laisser de telles vermines nous infecter.

Un instant, elle serra les mains de son parrain. Sans en avoir conscience probablement. La situation heurtait ses convictions et même elle peinait à lui trouver des excuses tangibles. Alors Millicent se résigna à s’engager sur le sujet qu’elle maîtrisait davantage : Pickering and Cie.

- Aux dernières nouvelles, Pick… Pickering ignorait tout de son existence et ne lui a donc jamais adressé la parole. Donc on peut pas dire qu’ils s’entendent tout court. Mais Pickering n’est pas un bouffondor comme les autres. Lui court après les Serpentards tandis que son cher jumeau les évite. En fait, il évite tout le monde, de ce que j’ai entendu. Seule la Branstone l’approche. C’est une Granger bis et une rabat-joie, toujours dans un bouquin ou en train de griffonner comme une gamine de trois ans. Flora adore lui chercher des noises pour la faire réagir. Peut-être qu’elle pourrait vous aider à atteindre la Sang-de-bourbe.

Si elle cherchait à donner le plus de consistance possible à ses paroles, Millicent n’était pas ravie de ses informations. Elle ne connaissait que peu la Poufsouffle et le Serdaigle. Elle ne pouvait donc répondre aux besoins de son parrain, ce qui l’agaçait. Par conséquent, elle se promit de rectifier très vite le tir. Elle devait être la meilleure indic, de crainte que d’autres Serpentards ne viennent prendre sa place.
Mais quelle ne fut pas sa surprise devant la mission de Kevin. Elle arqua un sourcil dubitatif et railla, croyant à une mauvaise blague :

- Atteindre Potter ? Lui ? Mais il ne sait même pas aligner trois mots ! Je ne comprends pas. Je ferai toutefois ce que vous me demandez Parrain. Je surveillerais et ………….. serai discrète, soupira-t-elle avec résignation. Vous pouvez compter sur moi, personne n’en sera rien.

Elle se retint d’ajouter qu’il perdait son temps. Son parrain la rabrouerait encore, et elle ne le voulait pas.

- Tantine sait-elle ce que vous préparez ? Vous aussi soyez prudent, Parrain. Je ne veux pas vous voir derrière les barreaux à vous faire aspirer par un détraqueur. Je devrais y aller, la bande va finir par me chercher et vous savez comment ils sont : toujours prêts à jaser. Heureusement pour nous, pour le moment ils ont jeté leur dévolu sur les fiançailles de notre garde-chasse, souffla-t-elle en roulant des yeux. Le pauvre, je le plains quand je vois ce qu’il se coltine. Grossière, cupide, ignorante et pauvre comme un sou (pardon pardon !). Et en plus elle a cherché à me voler, moi, votre filleule, Millicent Bulstrode ! J’aurais dû lui casser les dents !

Oui, disons-le, Millicent était encore vexée dans son amour propre. Et déjà elle mijotait sa vengeance. Mais en mettant son parrain au courant, elle était certaine de protéger ses arrières ! Pas folle la guêpe non mais !